Pour la toute première fois sur mon blog, nous nous retrouvons pour une analyse du MV de « Maniac » ! Cette chanson du deuxième mini album de Max Changmin est sous la direction artistique de Lee Rae-kyung connu notamment pour avoir travaillé sur les MV de l’artiste IU.
Elle s’inspire ici des plus grands noms du cinéma comme Scorsese, les frères Coen, Stanley Kubrick, Robert Wiene mais surtout Alfred Hitchcock dont elle tire son pseudo instagram @itchcock.
Vous pouvez retrouver mon analyse en avant-première au format vidéo sur YouTube :
Avec des références aussi claires et assumées, (dont elle a confirmé la véracité via son compte instagram), on ne peut que se demander comment ces diverses classiques cinématographiques ont pu être abordés visuellement dans le MV « Maniac » et utilisé pour servir le message de Max Changmin.
Si le titre nous indique déjà un thème assumé assez lugubre, celui de la « maladie mentale » ou du trouble de l’esprit, les couleurs de la miniature nous invitent plutôt à imaginer un univers chatoyant et comique.
Nous allons voir ensemble comment ce MV arrive à jouer entre comédie et tragédie.
Contents
Act 1 : Black Widow
Tout commence avec des plans qui mettent le spectateur face à une constatation : notre personnage est mort.
Et ceux-ci en reprenant habilement non seulement les codes mais aussi le découpage des plans de la célèbre scène du meurtre du film psychose d’Hitchcock.
Ces plans s’accompagnent d’une sirène de police et comme par hasard, la chanson débute avec la phrase « Somebody call the police ». Coïncidence, je ne pense pas !
Ces premières scènes du MV interviennent comme ce que l’on appellerait dans un roman une anticipation. Nous voyons à l’avance ce qui adviendra par la suite. Et en effet, SPOILER ALERT, à la fin de la chanson, nous revenons à ce zoom arrière sur le visage de notre personnage, allongé au sol.
Il s’agit désormais de comprendre comment notre héros se retrouve étalé au sol de cette salle de bain. Pourquoi donc est-il voué à la mort ? C’est là que débute la trame d’une histoire.
Un show télévisé…
Celle-ci débute de manière très comique dans une sorte de show bizz télévisé qui nous rappelleras sans aucun doute « The King of Comedy » de Scorsese ou encore « Brazil » de Terry Gilliam :
Assez soft je l’admets pour la référence à « Brazil ».
Mais on a néanmoins l’usage d’un format télévisuel comme pour le début de ce film.
Une manière subtile de montrer déjà aux spectateurs dans quel monde et état d’esprit il évolue.
Dans Brazil, le héros est malheureux car prisonnier d’une ville tentaculaire et cauchemardesque, régie par l’hostilité de tous contre tous. Il cherche alors à s’évader à travers ses rêves, de ce monde qu’il subit passivement le jour.
Dans « La valse des pantins » (= The king of Comedy), le héros est persuadé d’être un génie comique méconnu et suite à un entretien de quelques minutes avec un animateur d’une émission télévisée, il se convainc qu’ils sont devenues amis et qu’il lui accordera une place de choix dans son émission.
L’histoire en somme d’un homme qui court éperdumment vers un objectif qu’il n’atteindra jamais. Un choix de références qui n’est pas anodin une fois que vous aurez découvert le reste de cet analyse !
Mais revenons-en à la mise en scène qui est très théâtrale avec des éléments propre au spectacle : rideau, micro, costume scintillant. Mais aussi et surtout les expressions faciales de Changmin très exagéré.
Tout ceci participe à cette première ambiance très jovial, comique et grotesque.
…grotesque…
Celle-ci ne dure pas car notre héros est bousculé ou dérangé à répétitions et est interrompu dans son « discours » à plusieurs reprises. On le ressent par la mise en scène qui évolue, les changements de plans soudain, les mouvements de caméras, un zoom avant puis arrière. Mais aussi par la gestuelle même de Changmin qui se recoiffe, se replace puis semble prêt à reprendre mais est sans cesse dérangé.
Mais dérangé par qui ou par quoi ?
…mené par une Black Widow…
Déjà cette araignée qui trône sur son épaule comme une épée de Damoclès prête à l’achever en le mordant. D’ailleurs, les paroles de la chanson rentre en concordance avec cette « Black Widow », araignée veineneuse qui peut tuer un homme.
On comprends déjà par les paroles de la chanson que la femme dont parle la chanson est comparé à une Black Widow. Elle est dangereuse. Ce pourquoi nous avons aussi la présence de femmes sur le plateau.
Ce n’est encore une fois pas anodin que nous ne verrons pas l’un et l’autre sur le même plan. Car elles ne font qu’un. D’ailleurs son maquillage et ses vêtements noirs concorde avec cette théorie.
La « Black Widow » comme nous l’appellerons dans cette analyse est alors une métaphore de la mort. La femme est obsédé par lui au point où cela en devient dangereux. On peut dire que l’amour est devennu poison mortel :
You are like a black widow, a black widow. (…) You are poison to me.
https://genius.com/Genius-english-translations-max-changmin-maniac-english-translation-lyrics
Et c’est cet amour qui le rendra fou : « get tired and go crazy ».
…qui le rend fou
Il part alors se coucher, épuiser de ce show grotesque et se rend dans une chambre. Scène amorcée par un changement de lumière drastique annonçant la fin du show.
Si ce changement de lieu lui permet d’échapper à la horde de Black Widow qui le poursuivait telles des fourmis, un élément visuel vient prendre le relais pour montrer et rappeler au spectateur la folie, ou devrais-je dire, vertige auquel il fait face.
Mais la folie était déjà perceptible dans le décor avec une belle référence aux œuvres expressionnistes allemandes. Je pense notamment au « cabinet du Dr Caligari » dans lequel les décors déstructurés avec des figures géométriques irréalistes venait appuyer et donner vie à la vision mentale détraquée du personnage.
L’expressionnisme allemand c’est aussi un travail de détails dans le décor qui vienne indiquer à l’avance le futur du personnage. Et nous le verrons dans cette analyse, les détails annonciateurs de son destin funeste, il y en a.
Finalement, dès le début, nous sommes plongées dans un espace à la fois physique et mentale troublée.
Act 2 : Who drives him crazy ?
L’extrait débute ici avec notre héros qui incapable de trouver le sommeil comme indiquer dans les paroles « I can’t sleep at night night night », se retrouve à taper à la machine frénétiquement et sans interruption.
Un héros épié…
Un message « Help me », appel à l’aide qui ne passe pas inaperçu puisque depuis le début nous savons qu’il est en danger « I’m really in trouble (He’s in danger) ». La chanson accentue vraiment cette idée que notre héros se sent poursuivie constamment. Par les paroles qui indique qu’il se fait appeler tous les jours et sans arrêt « calling me daily ». Mais plus intimement et fortement avec ce plan de type caméra de surveillance.
Le focus est alors mis sur lui seul et donne un second clin d’oeil à l’idée d’être épiée, espionné dans un lieu aussi intime que peut l’être dans l’imaginaire collectif une chambre. Ce qui donne la sensation de dépasser ce à quoi nous devrions avoir accès en tant que spectateur. Une manière de nous faire percevoir l’intrusion dont faire preuve la fameuse « Black Widow » qui va jusqu’à accéder à sa chambre lieu qui symbolise l’intimité.
…et en danger…
Ce qui m’intéresse aussi dans ce plan c’est l’introduction à un nouveau personnage, celui du corbeau qui nous est présentée pour la première fois grâce à cette tenue décontractée si je puis dire. Je parle bien sûr de ce tatouage sur le torse que l’on retrouve dans le reflet du miroir au plan suivant.
Les enchaînements de plans qui suivent font référence cette fois à Shining :
Nous noterons ici l’usage de plans de plus en plus resserrés pour créer une tension et un suspens chez le spectateur jusqu’à atteindre l’implosion.
Nous avons alors deux plans très courts qui sont riches de sens avec le reste de la scénographie :
Ces deux éléments viennent indiquer le danger qui revient au grand galop pour troubler notre personnage.
…qui tente d’échapper à son destin…
Celui-ci quitte alors la chambre et nous avons droit à une course au ralentit combiné par des fondues enchainée à d’autres plans précédemment analysés :
Ces fondues sont presque une métaphore de la confusion mentale mais aussi temporelle de notre personnage. Il est tout bonnement devenu fou.
C’est assez contradictoire car la timeline, l’histoire semble s’accélérer alors qu’au contraire, les mouvements sont au ralenti. Ce qu’il se passe c’est que notre héros n’arrive plus à suivre physiquement ce qu’il se passe autour de lui. Il freeze littéralement (arrêt sur image du magazine time) alors que le monde autour continue de tourner :
Ce plan symbolise la mort du héros.
…mais est voué à mourir
C’est assez ironique d’être « immortalisée » dans un magazine ! Par ailleurs, vous remarquerez le nom de magazine choisi qui n’est certainement pas un choix innocent. On parle bien ici du « Time » : Le magazine du temps. Cela corrobore notre théorie sur l’idée d’un personnage fou qui n’arrive plus à vivre, qui n’arrive plus à se situer temporellement.
En même temps, (sans mauvais jeux de mot), vivre sans dormir, ça a de quoi rendre fou !
Si l’on prête attention à cette course, elle est parfaitement scénographié et réfléchit pour nous amener à cette conclusion de passage vers l’au-delà, vers la mort.
On passe d’un lieu à l’éclairage vert, synonyme de vie à celui obscur et rouge rappelant du même coup le danger auquel il fait face. Mais corrobore aussi l’idée de l’enfer, du diable (« Les yeux du diable ») et de la mort. Mais c’est aussi un couloir ! C’est un lieu de passage d’un endroit à un autre.
Dans le quotidien des artistes, il permet de passer de l’ombre à la lumière et ici métaphoriquement de la vie sur terre à la mort en suivant la lumière au bout du tunnel comme on dit.
Si on assiste ici à une course contre la montre, c’est aussi une course contre son destin auquel nous le savons déjà, il ne pourra échapper.
Pour revenir aux corbeaux, nous avons encore une référence à un film d’Hitchcock intitulée « Les oiseaux« . Ils sont présents ici pour rappeler l’idée de la mort qui rôde littéralement autour de lui. Dans le film les corbeaux s’attaquent à la population d’une ville :
D’ailleurs on retrouve bien plus tard cette réinterprétation de la course pour échapper au corbeau et donc à la mort :
Mais nous y reviendrons plus tard lorsque nous analyserons la dernière partie !
Act 3 : Voodoo Doll
Un amour obsessionnel qui vire au meurtre
La scénographie avec les chandeliers par dizaines rappelle étrangement la scène dans le film « The king of Comedy » (rdv 1:18:38) :
Scène dans laquelle comme par hasard nous faisons encore face à un amour obsessionnel qui vire au danger pour le personnage masculin. Dans cet extrait du film, une femme a scotché le héros à une chaise pour avoir un diner aux chandelles avec lui dans ce décor romantique. Elle lui admettra d’ailleurs son amour : « I love you ».
Mais le simple fait de le maintenir sur place et de le forcer à écouter son monologue montre que cet amour est malsain et qu’il pourrait mener à sa mort. La jonction est si fine entre l’amour et la haine. Il lui est d’ailleurs si simple de jeter un verre de cristal par dessus son épaule.
La femme racontera également une anecdote tournant autour d’un bain, ce que je ne trouve pas anodin étant donné le lien que nous pouvons faire avec psychose et l’histoire de ce film qui tourne aussi autour d’un amour maladif qui vire au meurtre.
Avec ses indices et ses références, on comprend aisément qu’ici c’est l’amour qui l’a détruit et tué. C’est d’ailleurs à ce moment de la musique que l’on évoque le passage de l’amour au « thriller ». Rappelons qu’elle est un poison pour lui selon l’idée de l’araignée venimeuse qui va le : « Poignardée par l’amour comme une poupée vaudou. »
Mais notre héros est-il réellement mort ? Et bien selon la linéarité du MV non, pas vraiment.
Un héros poignardée et transformée en poupée vaudou
Le doute est présent depuis le début car, mis à part son immobilité, il n’y a aucune présence de sang au sol, nous indiquant sa mort :
Il semblerait que celui-ci soit devenu cette « poupée vaudou ». D’ailleurs, le plan suivant nous le montre, nous le présente comme une statue, un mannequin sans vie :
Si physiquement notre héros n’est pas mort, son esprit n’est plus libre de le faire agir à sa guise. Il est manipulé comme une marionnette par la femme qui l’aime. On notera les plans en mouvements comme si nous étions le corbeau et que nous volions autour de lui :
Act 4 : credit
Et si tout ceci n’était qu’un rêve
Avec cette course du générique, et ce retour dans l’œil, on est en droit de se demander si tout ce qui vient de se passer sous nos yeux, ne serait pas une sorte de rêve, de songe, de volonté de notre personnage de se libérer de cette emprise qui même dans son rêve, ne cesse de vouloir le ramener là où elle veut le voir :
Le corbeau ou la black widow ferait alors métaphoriquement référence à l’aiguille qu’utiliserait la femme pour le faire agir ?
Peut-être vais-je trop loin mais c’est une théorie néanmoins intéressante à explorer je trouve.
Notre héros est poursuivie même après sa mort
Mais si notre héros est bel et bien mort alors a-t-il réussit à échapper à la femme qui l’aimait ?Et bien, peut-être pas. En effet, de nombreux éléments, nous laisserait penser que notre héros est en train, si je puis dire, de se retourner dans sa tombe. Le plan où l’image de lui courant revient dans ses yeux, nous laisse penser que même après sa mort, la black widow ou le corbeau à la fin de l’histoire, continue de le poursuivre.
De plus, si il s’avère que la femme en question est réellement une diablesse alors, même en se donnant la mort, il ne pourra lui échapper car elle pourra le retrouver là-haut.
Un héros qui regagne sa liberté au prix de la mort
L’idée dêtre devenue une poupée vaudou est intéressante puisque métaphoriquement, lorsqu’il court vers la mort, c’est aussi un passage du monde de la représentation et du spectacle vers l’au-delà qui selon Socrate est le monde des idées et de la Vérité.
En quittant la vie, il échappe à son destin d’homme manipulée qui ne pouvait se montrer tel qu’il était vers un monde où seule la vérité des choses est.
Avec cette hypothèse, l’acte 3 aurait lieu bien avant l’acte 1 où notre homme est forcée de faire ce show télévisé.
Conclusion
Cette histoire est interprétable de multiples façons et l’usage d’acte, nous permet en tant que spectateur non seulement de nous repérer dans la timeline, mais aussi de pouvoir jouer avec celle-ci.
Ce MV a été travaillé dans le moindre détails avec des références de ci de là, bien que pour la plupart originaire des films d’Hitchcock. Tout ce travail de scénographie vient appuyer les paroles de la chanson et entrer en concordance avec l’univers et les émotions décrites par le texte écrit par Max Changmin.
Mon analyse est purement visuel mais je vous invite évidemment à écouter la chanson qu’il est tout aussi intéressant de mettre en rapport avec le MV.
Et vous que pensez-vous ? Notre héros à réussit à échapper à son rôle de poupée vaudou en mettant fin à ses jours ou bien il a été tué par cette séance de vaudouisme ou bien encore il s’est transformé en poupée vaudou ? Est-il vivant, est-il mort ? Je vous retourne la question !
J’espère que mon analyse fut suffisamment claire et qu’elle vous aura plu ! A bientôt pour une prochaine analyse de MV de kpop !
Bonus
Bien trop de choses à dire et développer sur ce MV alors voici quelques éléments bonus !
Il y a des éléments qui donne un effet très rétro à ce MV comme la texture, de certains plans avec ces tâches qui rappellent les vieux plans tournés avec d’anciennes caméras :
Et puis le début avec cet effet télévision carré :
Mais aussi la manière dont le générique est amené et écrit. Et puis, la référence claire inscrite à la fin de celui-ci « In Alfred Itchcock’s Maniac ». Egalement, le fait même de diviser le MV en acte donne un aspect très cinématographique à l’ancienne comme on pouvait le faire notamment pour les films muets.
Enfin tous les objets scénographiques comme la machine à écrire et le choix des couleurs comme le orange qui est typique du style des années 70.
Autre point que je n’ai pas noté plus haut, l’usage de bombes dans les mains de Max pour montrer le point de climax et d’implosion du personnage qui n’en peut plus de cette situation :
Enfin dernier point et non des moindres, celui de la musique ! La chanson en elle-même par son instrumentale assez décalée rentre en concordance avec cette idée de folie et de déstructuration du temps.
On se rapproche musicalement de précurseurs comme Queen dans Bohemian Rapsody, Don’t stop me now avec des chants presque d’Opéra et des notes de piano qui viennent ponctuer l’ensemble. On retrouve tout cela dans l’instrumentale de « Maniac ». C’est d’ailleurs sur quelques notes de pinao que vient se clôturer le premier acte.
Je vous invite évidemment à aller découvrir la vidéo et la chanson par vous-même !
[…] Tout le MV joue sur cette idée que tout se passe dans sa tête. Tout ce que l’on voit est en réalité en train de se passer dans sa tête alors qu’il observe le contenu de la boîte qui n’est autre que la maquette de la maison en elle-même. En fait, cette chanson est encore une fois une représentation symbolique de son esprit. […]
[…] de la Black Widow que nous avons eu l’occasion de voir lors ma première analyse de MV avec Maniac de Max changmin. En effet, elle n’apparait pas si souffrante suite au décès de ces amants. Elle est […]